Hier je suis tombé sur mon vieux mémoire de maîtrise. J’y ai jeté un coup d’oeil distant, un peu effrayé de me rappeler toutes les bêtises que j’avais pu écrire à un âge si jeune. Et puis ô surprise, ô malheur, l’écrit était non seulement convaincant, mais je ne serais plus en capacité de le réécrire à ce jour. J’ai déchu, comme je vois bien que mon corps déchoit avec l’âge, comme il déchoit pour tout le monde, comme l’esprit déchoit aussi. Je l’ai constaté avec mes articles ici-même sur ce blog. Certes, j’ai gagné en expérience et en technicité. Je suis plus précis. Mais les éclairs de génie se font plus rares. L’énergie, cette belle énergie qui me caractérise et dont la jeunesse regorge, s’en va, aussi lentement et sûrement que mes cheveux blancs apparaissent.
Ne vous fourvoyez pas, je suis heureux de l’homme que je suis devenu. Mais en observant la photo de mon CV de l’époque je m’étonne d’une chose tout de même : si je devais échouer dans mes choix familiaux, comment se fait-il que ma réussite sociale n’ait pas été totale. J’étais jeune, beau, vigoureux, intelligent, plein d’énergie, de bon sens et je dirais même, sans aucune modestie, de génie. Comment se fait-il qu’il n’y ait pas eu une seule institution pour me tendre la main, ou plutôt une autorité dans cette institution, pour saisir une telle chance ?
La réponse est pourtant assez simple. Déjà à l’époque, la France pourrissait sur pattes. Désormais, avec le recul, en me remémorant toutes les rencontres qui auraient pu être décisives, je me rappelle ce professeur d’université orgueilleux, empli de sa relative renommée, dont la vieillesse inquiète devenait suspicieuse des idées nouvelles. Je revois ce recruteur gras et bedonnant, explosé dans son costume, jaloux de toutes ses illusions perdues que je magnifiais. Et puis ces fonctionnaires dont le seul pouvoir consistait à reproduire une forme de médiocrité. Très rarement, j’ai rencontré la compétence, c’est à dire le désir de faire mieux pour l’organisation que l’on sert, avec les humains qui la composent. Et quand je l’ai rencontrée, elle était opprimée par les institutions en place.
En France la compétence en est arrivée à se cacher, à s’exporter, à être recluse dans des métiers d’indépendant, certes très intéressants et productifs, mais avec peu d’influence sociale. Les dernières élections l’ont montré à plein : pas de place pour le génie, ni même pour le débat. Au contraire.
A part l’abstention, à un tel niveau que nos lois n’existent même plus, le fait le plus marquant a été pour moi l’absence de campagne électorale, aussi bien pour les présidentielles que pour les législatives. Au sortir de son bon score en forme d’échec, Marine Le Pen est vite partie en vacances. Les législatives qui suivirent allaient lui donner raison. Emmanuel Macron a organisé un seul meeting. Et le débat de l’entre deux tours a consisté pour les deux candidats, à avaler le plus rapidement possible la pilule de ce mauvais moment auquel la tradition républicaine les obligeait à se soumettre. Les gagnants ont fui la confrontation. Voilà comment nos plus illustres représentants ont été élus en France.
Car cette stratégie douteuse, qui ferait peur à n’importe quel humain encore vivant, s’est pourtant révélée payante. Ne pas faire campagne pour gagner la campagne. Il fallait y penser. La France moderne l’a fait.
En France, de nos jours, il est devenu dangereux de débattre et d’exposer des idées. Ou même je dirais, d’en avoir. Vous comprenez, ça pourrait faire réfléchir les gens, et les obliger à se positionner face à la complexité du monde, à reconnaître une autre autorité que celle qui les rassure. Les Français de nos jours refusent que le monde soit complexe, tels des enfants. Ils attendent que papa leur mette une bonne fessée, voire peut-être le Papa éternel, qui sait ? En attendant, ils favorisent une médiocrité abyssale, la même qui leur a permis de survivre jusque là.
Car ne vous trompez pas, cette médiocrité n’est pas une anecdote, elle est un système de pensée basé sur la jalousie, sur l’exclusion, sur le sacrifice du génie par le groupe, génie pourtant si répandu dans notre contrée. Privé de l’idée catholique, notre pays n’arrive plus à avancer. Il préfère la régression du QI, par l’immigration incontrôlée ou par la dégénérescence autochtone. Il attend la débandade, espérant qu’un autre, ses enfants, en souffriront à sa place.
Quand je pense que dans ma jeunesse, les parents avaient encore l’idée d’élever leurs enfants, même dans la basse couche sociale à laquelle j’appartenais. Désormais, ils veulent les voir « réussir ». Eux-mêmes, ces enfants, ne conçoivent leur avenir que de cette manière. Si ce n’est pas de la médiocrité ça… La pire des phrases qu’il m’ait été donné d’entendre sur le sujet est celle d’un intégré effrayé par la possible frustration d’une génération de personnes instruites qui ne trouverait pas d’emploi à son niveau, déclassée. Comme si, où que nous réussissions à nous insérer dans la société, l’instruction pouvait nuire. Il est plus facile d’apparaître compétent en éliminant toute forme de concurrence… A ce propos, les épreuves de sélection n’en sont même plus. Chacun, le plus imbécile des gauchistes inclus, a fini par reconnaître que le bac était donné. Pour ce faire, à cause de la baisse évidente du niveau, il a fallu abaisser tous les critères de réussite. L’institution va jusqu’à se venger sur ceux qui pourraient lui échapper. Des adultes de 18 ans ont été relégués à l’état d’enfants, qui comme dans l’école des fans, obtiennent 10 sur 10 à toutes les épreuves. Quant aux enfants réellement instruits, ils sont rabaissés pour qu’aucune tête ne dépasse, surtout les garçons un peu turbulents.
Double mouvement des mères et des électrices, l’enfant doit être « protégé », les idées ne doivent pas « choquer ». Il ne faut surtout pas bousculer mémère sous peine de se voir rejeté du système, battu aux élections, au chômage pour avoir traumatisé notre pauvre jeunesse en la déconsidérant, ou exclu de l’école pour ne pas avoir su comprendre ces règles implicites. Les 10% d’échec persistants au bac ne peuvent s’expliquer autrement. Les mémères et autres affiliés émasculés, ne veulent pas de vagues, mais elles veulent quand même garder le contrôle. Ce mouvement de l’intime est irrépressible. Tant que ce pays ne sera pas dans la situation la plus crasse possible, les femmes ne réagiront pas. Et comme elles ont le pouvoir, peut-être malgré elles…
Face à cette avancée surprise du Front national aux élections, les droitards se sont malgré tout réjouis. Eric Zemmour, leur premier choix, restait en marge, mais la représentation nationale gardait toutes ses chances grâce à ce résultat. Ils n’ont pas compris. Marine Le Pen a gagné parce qu’elle a souscrit à un système corrompu. Il faut être bien naïf pour espérer d’un tel résultat. Cette opposition n’en est pas une et se révélera incapable de gouverner différemment tant elle a changé son ADN pour le faire correspondre à celui de notre médiocrité. Oui, le Front National a gagné en représentation parce qu’il a volontairement affiché sa médiocrité, une médiocrité qui a rassuré les gens et le système oligarchique. Mais cette médiocrité ne débouchera sur rien du tout. Avec l’expérience, j’ai appris combien le mensonge ne débouchait que sur plus de mensonge. La forme doit être en accord avec la Vérité, et non l’inverse. Espérons donc que ce parti soit rempli de traîtres pour faire le travail quand l’occasion s’en présentera. C’est une des seules chances que nous avons de nous en sortir par le haut.
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