Le chef catholique

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Ô qu’ils l’attendent ce chef catholique qui, avec son casque et son arme à la main, saura mobiliser les énergies de manière magique et qui d’un simple mot repoussera l’envahisseur. Ou bien, qu’ils voudraient l’incarner et que leur valeur individuelle soit reconnue ! Que ce monde est rempli de telles personnes et qu’il est étonnant qu’un tel chef n’ait pas encore émergé au milieu d’une volonté si commune.

Ce souhait là, ne se réalisera pas à cause de la médiocrité spirituelle actuelle. Rien n’est évident pour un catholique surtout s’il ne met pas Dieu en premier. Or ceux là cultivent l’évidence en mettant leurs peurs ou leur ego en avant, pas Dieu. Ils sont nombreux à se réfugier dans les jupes de Marie en appelant cela « croyance en Christ » puis feindre l’impuissance tout en proférant des prières rassurantes qui les délivreront de leurs responsabilités. Quant à ceux qui entendent se retrousser les manches, que de compromis ou d’absolutisme, pour y arriver sur des esprits qui n’auront pas été préparés aux changements. Et plus le bateau coule, plus ces comportements se renforcent, car la peur appelle la peur, le compromis toujours plus de compromission. Quant à la tyrannie, elle ne cesse qu’avec la mort du peuple ou du tyran.

Un esprit raisonnable devrait pourtant savoir reconnaître l’erreur que nous entretenons. Mais point de remise en question dans notre milieu où la remise en question devrait être tout, ce que nous appelons la confession ou l’examen intérieur. Bien des erreurs nous animent. Nous oscillons entre renoncement, incantation stérile et pensée toute puissante infantile. Cet article aura donc pour objectif de nous y retrouver un peu. Le chef catholique magique qui arriverait sur sa nuée s’appelle Jésus. Il ne viendra qu’à la fin des temps. Jusque là, nous devons nous battre et apprendre à nous diriger en Le suivant. Pour cela, il nous faudra un chef catholique. Or si un chef catholique n’est pas un tyran absolutiste, ni chef qui singe le monde, ou un enfant apeuré, qu’est-ce donc ?

Dans la famille, la hiérarchie semble avoir été clairement pensée par saint Paul : « la femme doit être soumise à l’homme et l’homme doit aimer sa femme » avec toute la difficulté d’aimer en vérité, et de se soumettre chez un être qui a tout pouvoir dans les rapports personnels.

Si le monarque est catholique, celui-ci est soumis au Christ, et le peuple lui doit obéissance. Théoriquement très simple. Il faut pourtant que ce monarque soit vraiment catholique, sport périlleux s’il en est, et que le peuple soit croyant. Autant dire qu’il faudrait dans cette situation idéale, que nous appartenions déjà à « l’autre monde ».

L’Église est donc là pour guider les uns et les autres de ce monde très imparfait à l’autre. Et dans notre Eglise, la hiérarchie semble simple également. Les « appelés » deviennent mariés, moines, prêtres, prophètes, rois. Puis l’Esprit Saint les désigne à des charges plus grandes, jusqu’à celle de Pape.

Dans la pratique, c’est plus compliqué. Le Pape devrait nous servir de socle en ces temps de doute. Or, par exemple, depuis que notre guide suprême ne se trompe plus en matière de dogme, depuis que des théologiens modernes ont crû bon de nous rendre service en inventant « l’infaillibilité pontificale », acte d’autorité s’il en est, jamais les dissensions n’ont été aussi importantes dans nos communautés. Et pour cause, cette idée d’infaillibilité s’est fracassée face à la réalité. Etait-ce si compliqué de penser que, si le mécanisme d’élection au sein de l’Église nous apportait le meilleur Pape donné pour une époque donnée, ce Pape était toujours capable d’erreurs ? Apparemment très compliqué oui. Par manque d’humilité, nous avons été conduits dans une impasse. De nos jours, les plus fervents catholiques qui sont le plus attachés à l’infaillibilité pontificale, remettent en cause le Pape, qu’ils accusent de ne pas respecter le dogme. En somme, dans leur ferveur, ils sont toujours au bord de l’apostasie. Certains ont franchi le pas en devenant sédévacantistes. La volonté de pureté, pharisianisme s’il en est, a semé la division. Il en a résulté que la fonction de chef a été délégitimé, au sein même de nos communauté, par volonté autocratique. Et pour cause, le catholique devrait surtout s’occuper d’humilité et de service. 

Or cet affaissement de l’autorité ne concerne pas que l’Eglise. Que ce soit au niveau politique, dans la famille ou dans l’Église, le modèle d’autorité est devenu chancelant, malgré les leçons qui nous ont été transmises. Dans la famille, les assauts de la modernité se sont faits sentir, et la vague indifférenciatrice que j’ai souvent étudiée et dénoncée, a ravagé notre société jusqu’à atteindre notre Eglise. A la tête de l’état, ni les institutions, ni les chefs, ne sont plus catholiques. Après avoir confié au politique un rôle qui le dépassait, depuis Constantin, l’Eglise a vu ce politique se retourner contre Elle et La combattre, après l’époque médiévale. De nos jours, le prêtre est dominé par l’idéal démocratique. Les décisions collégiales font florès, ou plutôt l’absence de décision et de direction claire. Le secret de la confession n’est plus, ni respecté, ni compris. L’état pénètre dans les Eglises avec l’accord de nombreux fidèles pour y faire régner son ordre (distanciation sociale, masques), avec quelques restes de pudeur en matière de protection du culte. N’étant pas spécialement monarchiste, il faudra pourtant que je reconnaisse combien la décapitation du roi aura contribué à ce genre « d’avancées ».

La famille, l’état et l’Église, sont les organisations les plus structurées, et où la hiérarchie et le chef seraient les plus faciles à conceptualiser. Elles sont pourtant dans l’indécision. Mais dans les associations, dans les entreprises, dans l’administration, dans les villages, l’autorité y est encore moins évidente, et agir dans notre monde qui se délite, y a donc été rendu d’autant plus difficile.

L’entreprise par exemple, qui est le lieu d’exercice de la loi naturelle, est soumise à un intérêt animal. La hiérarchie s’y structure de manière plus évidente qu’ailleurs parce que l’appât du gain efface les différences. Celui qui fait de l’argent prospère. Celui qui n’en fait pas est éliminé. Il faut s’entendre pour cela, à l’intérieur d’une même entreprise. Puis vient les rivalités, les jalousies, qui sont une manière pour l’individu de s’approprier une richesse qu’il n’a pas créée. Seule l’idée chrétienne est capable d’annihiler ces tensions tout en tolérant l’invention. L’invention dans la tribu, ou dans les civilisations archaïques, c’est le changement d’ordre. Il faut beaucoup de sacrifices humains, au sens littéral du terme, pour l’empêcher. En contenant ces pulsions morbides, la théologique chrétienne nous a permis d’avancer, en faisant fi de la jalousie, ou plutôt en diminuant la pression à l’immobilisme qu’elle générait. Ainsi, les sociétés chrétiennes ont permis l’émergence de chefs dans les entreprises, qui pouvaient innover. Nous verrons comment un peu plus loin. Pourtant ne sont-elles pas exemptes de pressions à l’indifférenciation, et leurs dirigeants ont-ils perdu en légitimité. 

Dans les administrations, l’intérêt monétaire est décorrélé du métier. Le sens du métier, le professionnalisme, y est moins évident. Celui qui réussit dans l’exercice de ses fonctions, n’est pas celui qui a facilité la vie de ses administrés, mais celui qui a obéi à sa hiérarchie, dont l’intérêt est justement de contraindre les administrés afin de les garder sous sa coupe. L’appât du gain, c’est le contrôle. Il n’y a jamais de limites aux abus qu’une administration peut commettre lorsque l’honneur, ou le contrôle public ne s’exerce plus sur elle. L’honneur, ce reliquat tribal, est en passe de disparaître. Reste le contrôle public qu’une oligarchie d’argent matérialiste tente d’exercer pour mieux détourner les richesses qu’elle dit créer. Le chef d’une administration devrait donc être emprunt d’idéaux catholiques ou être sérieusement contrôlé par un chef de gouvernement catholique. De la science fiction en ce moment. 

Les associations sont fondées sur un objectif commun qui devrait fédérer les participants. Mais elles ne sont pas dénuées de recherche de prestige social, de rivalités mimétiques, ou d’incompréhensions qui les empêchent de prospérer avec un chef respecté en leur sein. Les associations, et plus généralement, le bénévolat, souffre en ce moment en france. 

Le village, cette unité de vie, n’existe presque plus. Les groupes sur internet l’ont remplacé, avec toute la sécheresse inhérente qui les caractérise.

Le chef, qui devrait harmoniser toutes ces organisations a disparu, exception faite de certaines entreprises. Seules restent solides, les institutions les plus organiques, les plus tribales qui soient, comme l’islam, ou la lutte écologiste pour pacha mama, dont les chefs semblent évanescents. Qu’importe qu’un imam dit radicalisé soit expulsé, quand toute une communauté vit très bien sans lui. Qu’importe de sanctionner quelques activistes de l’écologisme lorsque d’autres agiront à l’identique. Chacun semble devoir refluer dans sa sphère de croyance, sans liens. Sauf peut-être dans l’entreprise, où la nécessité de manger persiste. Par contre, la tête de l’état prend des allures autocratiques. L’administration le devient d’autant plus. Les associations sont fragilisées. La société bouillonne de violence à cause d’un agir qui ne peut s’exprimer. Tout le monde est maître et compagnon comme dirait ma grand-mère, face à un tyran. Cela signifie aussi que l’expertise, et la notabilité disparaissent, et avec eux le contre-pouvoir qu’elles induisaient. Sinon, la perte de confiance est généralisée, et il m’apparaît, à moi, comme à beaucoup d’autres autour de moi, comme d’une impossibilité de nous trouver un chef légitime en ces terres qui ne sont plus catholiques. Peut-être parce que nous ne sommes plus catholiques et que nous avons oublié jusqu’à la notion de chef qui nous était propre…

 

Différence entre le chef catholique et le chef païen

Ceux qui exercent leurs fonctions en dehors de la loi naturelle, génèrent la misère. Mais ceux qui exercent leurs fonctions en dehors de la loi de Dieu Père Fils et Esprit Saint, ne changent rien à la marche de la loi naturelle. La loi naturelle est notre guide et notre prison. Un chef de la loi naturelle, se rencontre à toute époque et dans toute société. Ce chef amène la prospérité. J’ai un peu étudié son profil ici. Mais la prospérité ne change pas le coeur de l’homme, ni les relations humaines. Celui-ci reste confiné à son animalité, basée sur son envie de survivre. Pour que le monde change, il faut un chef catholique. Or qu’est-ce qu’un chef catholique ?

Jésus nous répond très clairement sur le sujet : « Le premier d’entre vous sera celui au service de tous les autres. » Ainsi l’Église a grandi sur ce principe. Les appelés, sont en premier lieu des serviteurs. Renonçant à fonder famille, ils donnent toute leur vie pour Dieu et l’humanité. Cependant, la forme hiérarchique de l’Église, cléricale dirait notre Pape François, s’oppose à ce principe. Le Pape sert le monde. Mais il le dirige aussi comme il l’entend, avec les manques qui sont les siens. Ils peut donc imposer des directives qui vont à l’encontre du service de ses frères, par ignorance principalement. La hiérarchie et l’obéissance ne règlent donc aucun de nos problèmes de catholiques.  Car à l’intérieur de cette hiérarchie, nous sommes tous appelés à servir nos frères. Le précepte de Jésus est donc anti-clérical à l’extrême. Non seulement, il demande que les chefs soient les plus petits d’entre nous, mais encore que chacun d’entre nous veille à renoncer à ses abus sur les autres. Tel est le sens de la responsabilité individuelle poussée à l’extrême : choisir le bien contre le mal en toute conscience, quelques soient les pressions hiérarchiques que nous subissons.

Le catholique/le chef catholique est donc indépendant de toute hiérarchie. Il doit exercer le bien. La vertu d’obéissance que nous cultivons, semble être un palliatif à notre impossibilité de servir des humains. Comme nous ne sommes pas toujours capables de nous servir les uns les autres, nous nous en remettons à un autre que nous avons élu pour son expérience, afin de nous guider. Cette vertu d’obéissance est finalement très bonne pour celui qui se l’applique. Elle lui permet de servir son frère parce qu’il le demande, et sans avoir à se poser de questions. Elle annule toute violence mimétique. Mais combien peut-elle porter tort à celui qui exerce cette responsabilité de chef ou qui fait acte d’autorité sur son frère ! Saint Benoît nous le rappelle dans sa règle. Quel risque de damnation supplémentaire pour celui qui décide. Voilà comment les chefs des communautés catholiques se sont retrouvés ermites à certaines époques, tout en étant rappelés de force pour exercer leurs fonctions dans le groupe. Pour vous donner un exemple plus précis de dysfonctionnement en matière d’obéissance communautaire, combien de moines et de moniales ont subi les avanies de leur communauté et par la suite, ont été reconnus comme saints au sein de notre Eglise et par cette même communauté ! Images du Christ, ils ont été sacrifiés par l’Église elle-même, comme un Don Bosco par exemple. Comme si l’Église doutait alors du Christ et utilisait la persécution pour retrouver la Foi. Drôle de comportement si l’on y songe, très anti-christique finalement, permis par cette dite vertu d’obéissance.

Certes, l’humain soumis à cette ostracisation, n’est pas cloué sur une croix, mais c’est tout comme. « Montre nous que tu es le Fils de Dieu », semblent-ils répéter avec les persécuteurs du Christ. Et le saint obéit, parce qu’il ne lui est pas laissé d’autre possibilité s’il veut témoigner de Dieu, jusqu’au martyre. Ainsi expurge-t-il la violence mimétique de l’Église, raison pour laquelle ces saints sont si célébrés à l’intérieur de notre Eglise latine. Or quand il ne s’agit plus de la vie de l’Eglise, il arrive aussi à ce saint de désobéir. Il ne veut pas se prosterner devant césar par exemple. Alors est-il sacrifié par césar et le peuple qui ne veut pas se poser de question. Il est encore sacrifié de bien des manières pour le changement du monde. Et finalement, à l’intérieur de l’Eglise ou à l’extérieur, il est souvent sacrifié au nom de l’idée qu’il se fait de l’obéissance.

Or plus que le sacrifice, il serait plus bénéfique à notre société d’apprendre à vivre avec le saint/le chef catholique. Si le saint permet au monde de retrouver la paix intérieure lorsqu’il le sacrifie, il ne change pas la nature sacrificielle d’un monde qui a eu besoin de se damner pour pouvoir sortir de sa misère. Et si le monde ne change pas par essence, alors cela veut dire que nous avons fait du sur place spirituellement.

Quelque soit son aura, au sein de l’Eglise ou dans la société, il est très difficile à un saint d’émerger, à un chef catholique qui doit être saint, d’émerger, s’il est ostracisé publiquement. Son retour en grâce après son sacrifice, n’y change rien. Le monde ne change pas tant grâce à son sacrifice, idée païenne par excellence, que toute les fois où ce monde a refusé son sacrifice et s’est laissé enseigné par lui. Voilà la différence d’avec le monde ancien. Il faut apprendre à vivre avec le saint, en sainteté pour sanctifier nos existences, et non le sacrifier. Car Jésus est l’unique agneau sacrificiel. Et sacrifier une autre personne que Jésus en cédant à un péché, quel qu’il soit, c’est répéter l’abomination de l’exécution de Jésus. Idem pour le chef catholique que tout bon catholique devrait suivre sur son chemin de sainteté, lorsqu’il fait le bien, plutôt que de sacrifier à la croyance commune. Et en fait, idem pour le catholique tout court qui doit être saint et chef catholique en puissance.  

Le chef catholique est une drôle de bête en vérité. Il tend vers la sainteté et il gouverne lorsqu’il lui en est laissé l’occasion, par les peuples, par son Eglise. Voilà pourquoi en outre, il se retrouve plus de saints dans la hiérarchie ecclésiale que dans le monde profane, où les vertus christiques sont moins suivies. Si elles l’étaient dans ce monde, un chef catholique laïc émergerait du jour au lendemain donné par Dieu, et il vaincrait tous ses ennemis. Mais le monde, empli de péché, ne veut pas de ce chef. Ou plutôt, il veut de ce chef, tel qu’il l’imagine, en roi païen. « Si j’étais roi en ce monde, mon Père aurait levé pour Moi des nuées de légions pour vaincre les princes de cette terre. » L’imaginaire catholique n’est pourtant pas exempt de ce désir de gloire terrestre, que la structure hiérarchique de l’Église contribue à favoriser. « Que Dieu nous donne un roi » demandent les Hébreux (livre de Samuel). Alors le prophète doit désigner un roi sous la férule duquel ce peuple d’impie souffrira. Le peuple n’en a que faire. Il préfère l’esclavage à la liberté christique, le roi catholique le plaçant dans un entre-deux. Il est vrai que la liberté christique est dure à vivre. Elle fait de vous un être dévolu à la solitude et à la souffrance, transcendée, Dieu merci. Et il arrive parfois que les vertus des saints se diffusent dans la société. Alors la jalousie, ou l’envie ne président plus aux décisions. La colère est contenue. L’orgueil combattu. L’avarice détruite. La luxure n’est plus donnée en modèle. Le meilleur est recherché et s’impose.

Le chef catholique ne peut s’imposer qu’au milieu d’un peuple catholique. Pour les autres, il parle hébreux. Même pour les catholiques, emplis de leurs péchés, il n’est pas évident de l’accepter. Ceux-là préfèrent quelque notable qui leur renverra une bonne image de leur communauté, une personne qui leur ressemble pour flatter leur ego, un garant de l’ordre qui saura rassurer leur besoin de paix intérieure. L’ordre pour le catholique, c’est le point faible de sa recherche spirituelle. L’obéissance, l’ordre, structurent son idéal. Mais le monde avance aussi dans le désordre et le chaos. Le fomenteur de chaos détruit ce monde, tandis que le maître du chaos en profite pour le faire avancer, en dansant ? L’un et l’autre sont opposés, mais le catholique confond souvent l’un et l’autre. Malade parce que Jésus est venu pour les malades, il se réfugie facilement dans les jupes de Marie, au lieu de courir vers la croix. Ah qu’il serait meilleur avec un peu plus d’inconscience… que certains appellent de la Foi et de l’Espérance.

Le chef catholique n’existe pas en vérité, il ne peut avoir de substance. Comme il choisit le bien plutôt que le certain, il échappe à toutes les tentatives de représentation ou d’identification ou d’appropriation. La monarchie catholique n’a pas abouti à nous donner des chefs toujours catholiques, loin de là. Or le peuple infidèle veut une personnification. Par peuple, j’entends aussi n’importe quel groupe. La foule commune exige son gourou qui lui donne des certitudes à penser, qu’elle appelle foi. Loin d’être une prise de risque, ce genre de foi est un désir de sécurité régressif. Cependant, le chef catholique a décidé d’avancer, en vérité, quitte à provoquer la terreur dans son entourage, cette peur panique qui paralyse et dont le commun se défie à proportion qu’il s’est terré dans le connu et le reconnu. Avancer en vérité, ce n’est pas reproduire à l’identique les moyens que ce monde se donne, fait d’abus de pouvoir, d’autorité institutionnelle, et de terreur retournée contre les désobéissants. C’est être terrifié et dépasser cette terreur.

Le chef catholique qui tente d’incarner la force de ce monde se ridiculise doublement. D’abord, il fait toujours moins bien que ces serpents qui seront oubliés demain, voire réprouvés à cause du chaos qu’ils auront semé. Mais en plus, il ne se respecte pas. Car le vrai chef catholique/le vrai catholique/le vrai saint est faiblesse ultime. Sa faiblesse écrase le monde et se dirige vers Dieu. Sa douceur abat les montagnes. Il gouverne en se faisant le plus petit de tous, en renversant les puissants par exemple, en renvoyant les riches sans leur donner rien de plus, les mains vides, en élevant les humbles, et en dignifiant les affamés. Qu’il est dur d’accepter d’être servi, puis de servir à son tour.

 

Le chef de famille catholique

L’homme est-il le chef catholique de sa femme ? Voilà qui pose un autre souci. Là encore, il faut servir en gouvernant. Que signifie être chef, lorsqu’un individu est soumis à plus grand que lui, cet Autre qui préside à ses décisions ? Qui sert le plus la famille si ce n’est la femme, au quotidien ? Est-ce à dire qu’elle dirige ? Là encore, le concept de chef catholique s’évanouit devant l’altérité. Celui qui sert le plus l’autre, dirige sa famille. Servir l’autre, n’est pas s’enfermer dans un rôle ou un statut, mais d’abord se mettre au service, puis reconnaître que l’altérité doit être respectée : quand le service s’est imposé, alors la femme devient femme soumise à son mari, et l’homme aime sa femme. Encore faut-il que l’amour ait présidé à ce service. L’amour de Dieu seul permet un tel service, et évite tous les abus de pouvoir qui menacent le chef et ceux qu’il dirige. Ainsi peut-on échapper un peu à la dualité du raisonnement et du sentimentalisme, du masculin et du féminin, qui tentent d’imposer leurs vues dans les relations de couple. Le chef catholique n’est ni homme ni femme dans le couple, tandis que l’homme tranche et la femme accueille les décisions de son mari. Diriger ne veut pas dire être chef quand le premier d’entre nous, doit servir les autres. Servir signifie aussi s’opposer lorsque l’autre ne se respecte pas, cela peut aussi signifier conflit, dissension, et cela n’exclue pas des incompréhensions. Combien sommes-nous humains.

Jésus en renversant les relations de pouvoir est bien plus subversif que nos contemporains, avec leurs faux changements de sexe. Il interdit l’abus en accolant l’autorité à la légitimité de manière forcenée. Celui qui sert, ne peut en aucun cas, jamais, se servir. Voilà d’ailleurs pourquoi les agresseurs sexuels tentent de se justifier dans une société à racines chrétiennes, par le plaisir qu’ils auraient donnés aux enfants. Même un Alfred Kinsey défend l’idée d’orgasme au moment même où il torture des bébés. En quelque sorte, ces abuseurs veulent se dire qu’ils les ont servis, à leur manière. Méfions nous des rhétoriques qui singent la Parole sainte.

Au lieu de lutter contre l’autorité du prêtre, du père, du possible abuseur d’autorité, nos contemporains devraient leur rappeler, et se rappeler pour eux-mêmes, qu’il n’est trace de service dans la réalisation de ses pulsions. Il arrive que nos pulsions soient ordonnées et trouvent un exutoire légitime avec un partenaire consentant, majeur, engagé et fécond. Le plus souvent, nous devons les réprimer, autant qu’il nous est possible de le faire, avec nos maigres moyens. Remercions Dieu lorsque nous ne sommes pas soumis à des désirs fous que nous sommes incapables de réprimer, car même lorsque nous ne sommes pas pédomaltraitants, nous sommes souvent soumis à des pulsions qui n’ont rien de glorieux.

Le tabou grégaire peut avoir ici son utilité, lorsqu’il pallie le manque de tenue chez un individu, et il faut parfois remercier la société pour son aveuglement à se donner des lois qui ne tiennent pas compte du bien et du mal, mais qui interdisent seulement ce qui ne doit, en aucun cas, se réaliser dans un groupe donné. « Celui qui fait mal à un de ces petits, il vaudrait mieux qu’il ne soit jamais né, ou qu’une pierre lui soit attachée au cou et qu’il soit jeté à la mer ». Dans l’ensemble, la peine de mort qui n’est pas théologiquement admissible pour un catholique à titre personnel, est pourtant légitime à un niveau social si elle peut contribuer à instituer ce genre de tabou dans la société. Heureusement, nous avons progressé paraît-il, et peut-être avons-nous les moyens de castrer chimiquement la personne qui cède trop facilement à la frustration, plutôt que de la supprimer ?

Ainsi le chef, ce chef si grand, n’importe quel chef en vérité, est soumis à des pulsions les plus ridicules qui soient. Comme le dit l’adage populaire pour mieux s’en moquer, « il pète aussi ». Le catholique en a parfaitement conscience. Il ne déifie pas le chef, se sachant chef lui-même, très imparfait. Le chef catholique/le saint/le catholique construit donc une société, où, non pas toutes les pulsions peuvent s’exprimer, même les plus perverses, mais où le pulsionnel est surveillé comme le lait sur le feu et encadré.

Si le catholique refuse de suivre aveuglément une loi sociale qui n’aurait pas été construite sur la notion de Vérité, il doit d’autant plus veiller à ce que le pulsionnel des individus soit sous contrôle dans l’Eglise. Voilà d’ailleurs ce à quoi nous avons été forcés par la société laïque. Les abus homosexuels et pédomaltraitants ayant été minorés au sein de l’institution, le tabou social a dû revenir en force faire loi en notre sein. Comble de la décrépitude, nous nous sommes faits donner des leçons par la société civile en matière d’abus sur enfants ! Si cette société civile encourage les abus beaucoup plus que l’Eglise avec sa théologie du changement d’identité sexuelle, le paradoxe a voulu qu’elle nous juge aussi durement que nous nous étions proposés de le faire envers le monde. Nous avons été jugés avec la mesure que nous voulions utiliser pour les autres. Face à notre déroute, nous pouvons abandonner notre idéal christique et souscrire aux possibles changement d’identité sexuelle. Ou bien nous réformer, et devenir plus exigeants avec nous. Je crois qu’un chef catholique devrait proposer la deuxième solution, et qu’un catholique tout court, devrait se l’appliquer dans sa vie, quand bien même le chef défaillirait, parce que ce laïc est son propre chef au sein de l’Eglise, devant le dogme, lorsque ce dernier est cohérent.

Alors qui dirige dans un groupe catholique ? Peut-être qu’au lieu de se poser cette question, nous devrions laisser l’Esprit Saint nous faire avancer dans nos vies, au lieu de nous attacher à la notabilité, à la cléricalité, à la hiérarchie, à nos renoncements. Peut-être devrions-nous commencer à respecter ceux qui sont vraiment des exemples en ayant donné leur vie à Dieu. La force de la loi naturelle, de la hiérarchie dans nos familles, s’impose tant que nous sommes seulement païens. Dans l’Eglise, cette hiérarchie s’impose pour des questions pratiques et dans une démarche de soumission à l’Esprit Saint. Mais elle n’est pas un absolu car l’erreur est humaine, même dans la prière. Dans les entreprises, la loi naturelle du chef est bien mieux vécue et permet une prospérité plus grande sous l’empire d’un chef catholique qui est au service de ses employés et de la société, et qui sait se remettre en question le plus profondément possible face à ses échecs. Quant au monde politique catholique, je crois qu’il ne devrait pas vivre différemment d’une communauté monastique, où les meilleurs seraient promus eu égard à leurs qualités et devraient rapidement céder la place sinon. Comme le chef d’entreprise, le chef catholique politique/associatif ne devrait pas cesser ses remises en question pour avancer personnellement et faire avancer la cause catholique dans la société. Celui qui serait le plus à même de se remettre en question devrait être promu. Enfin, dans le monde familial, le statut naturel des épouses, des maris et des enfants, n’augure en rien de la foi de chacun et de l’exemple qu’il pourrait donner aux autres. Bien des mères de famille ont influencé leurs enfants en ce sens, bien au-delà de leur simple statut de mères. Bien des épouses ont favorisé la conversion de leurs maris. L’inverse étant quasi systématique mais plus rare. Et parfois même des enfants, ou des servantes dans la famille, ont édifier leurs maîtres. Tous ceux là se sont soumis à une idée qui dépassait le statut naturel et hiérarchique de celui à travers de qui l’idée catholique passait. Ils se sont soumis à un chef qui n’était pas naturellement le leur, pour la plus grande gloire de Dieu dans la société. 

3 réponses à “Le chef catholique”


  1. Avatar de Cyrus
    Cyrus

    Cher Monsieur Durandal,

    Que pense le chef catholique que vous êtes de cette partie de vos compatriotes présente à cette manifestation : Manifestations monstres en France pour dénoncer l'antisémitisme – YouTube

    Pour ma part, je la trouve ridicule. Cela étant, la France, d'essence catholique, a vocation à être anti-juive, pas nécessairement antisémite. Les Arabes et les Hébreux, musulmans et juifs, n'ont rien à faire en France.

    Quant à Israël, il doit cesser d'exister pour que la paix revienne au Moyen-Orient. Les juifs doivent aller vivre en Arizona, dans un climat semblable à Israël et laisser en paix les sémites du Moyen-Orient.

    Cordialement,

    Cyrus


    1. Avatar de Léonidas Durandal

      M Cyrus,

      Ne voudriez vous pas avoir un débat nuancé avec moi ? et pragmatique ?

      M.D


      1. Avatar de Cyrus
        Cyrus

        Bonsoir M. Durandal,

        Pourquoi cet honneur ?

        Nous sommes souvent d'accord et lorsque nous ne le sommes pas, nos désaccords sont forts et nuancés, ce qui est génial pour les lecteurs.

        Vous savez que je vous aime beaucoup.

        Cordialement,

        Cyrus


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