Dans les rues de Paris, le jour précédent la grande manifestation du 26 mai 2013, j’ai été très surpris des réactions des gens autour de moi. Je me suis demandé comment un simple polo avec un papa, une maman et deux enfants pouvait provoquer tant d’effet. Je débarquais de ma province, d’un milieu qui ne savait rien de ce symbole et je portais mon vêtement sans aucune arrière pensée et de manière décontractée.
Force à été de constater que les regards ne l’étaient pas (décontractés). Que ce soit pour me soutenir, ou bien pour me dénoncer du coin de l’oeil, je sentais une tension palpable eu égard au port de ce vêtement. Nous avons fini par entamer la conversation avec un Parisien sur le sujet. La personne en question m’a dit, accompagné de sa femme, de sa poussette et de ses enfants, qu’il était dangereux de porter ce genre de signe. Il parlait à voix basse dans le métro et semblait même inquiet du sujet que nous abordions. La rame était presque vide. J’ai compris un truc vraiment incroyable : beaucoup de gens de la capitale vivaient dans la peur.
J’ai fini par me poser tout un tas des questions : Démocratie ? Liberté d’expression ? Doxa ? Pression sociale ? Tout y est passé. Comment de tels sentiments contrastés envers des inconnus avaient pu naître dans un espace aussi anonyme que celui de la capitale ?
Aujourd’hui, je lis l’histoire de cette énième personne qui vient de se faire arrêter de manière abusive parce qu’elle portait ce logo sur elle (NDF du 31/05/2013). Sur « Nouvelles de France », le traitement de ce sujet m’a toujours semblé exagéré, comme si à chaque fois, l’attitude ridicule des forces de l’ordre n’aurait même pas dû être relevée. Mais j’étais à côté de la plaque. A travers le port de ce symbole, d’un couple avec ses enfants, il se joue un vrai bras de fer idéologique. Après être monté à la capitale, j’ai fini par comprendre que leur attitude était calculée et que ce sujet était sérieux. Notre victoire se joue ici, dans la rue, et nos dirigeants le savent, nos policiers le sentent de manière instinctive, même si nous ne comprenons pas encore l’importance de ce symbole. La question centrale qui va déterminer notre victoire ou pas dans les prochaines années, c’est de savoir si nous prendrons la liberté de nous habiller comme nous l’entendons ou pas, de nous exposer malgré les regards, malgré les forces de l’ordre, malgré la chape de plomb ambiante.
Depuis mon voyage sur Paris, comme si je sentais que quelque chose avait changé, le polo de la manif pour tous est resté sur mes épaules. Il va bien falloir que je le lave à un moment donné ou à un autre. Cependant, je le remettrai bien vite, car à travers le regard des autres, j’ai compris qu‘il me permettrait d’apprendre à assumer mes idées au quotidien, au contact de mes relations proches, qu’il était un outil de médiation formidable pour entamer la conversation, au-delà d’internet et que, lorsque tous les Français le porteraient, il faudrait bien que le gouvernement recule.
En ce jour, je me suis enfin rappelé qu’aujourd’hui comme hier, les plus beaux combats avaient un prix. Ce logo dérange. Il éveille les consciences. Il appelle à la révolte. Il nous demande du courage, mais il est notre chance. Il nous permet d’entrer en résistance de manière pacifique dans la rue, de contourner les médias qui veulent nous faire croire qu’une singerie pourrait remplacer le mariage d’un homme et d’une femme. De manière perspicace, les forces gouvernementales ont choisi de nous priver de liberté sur ce point, mais elles ne pourront pas nous contraindre bien longtemps si nous usons de notre liberté pour traquer et détruire cette nouvelle forme de tyrannie de la pensée. Ce polo moche comme tout, n’est pas une anecdote du combat. Il est le combat. Qu’il soit aussi laid est aussi une chance. C’est la preuve que nous ne le portons pas pour nous embellir, par snobisme, ou pour faire bien.
A l’image du film V pour Vendetta et de son étrange masque, anonyme, le polo de la manif pour tous est notre signe indistinctif. Et quand le peuple se le sera approprié, quand chacun de ceux qui le porteront saura dire : « je veux qu’un enfant puisse bénéficier de la présence d’un père et d’une mère pour grandir dans l’altérité. », quand ce seront des ouvriers, des chômeurs, des cadres, des mères de familles, des agriculteurs, des étudiants, des hommes, des femmes, des enfants, des adultes qui le porteront, forts de leurs différences, unis d’une conviction identique, la victoire sera proche. L’ironie veut que Guy Fawkes dont l’histoire est rappelé dans V for Vendetta ait été un catholique, mais que son symbole ait été repris par la franc-maçonnerie dans ce film afin de contribuer à faire la promotion de l’homosexualité. Ce symbole n’appartient pas au lobby homosexuel, ni aux francs-maçons. Il est notre héritage. Il nous appartient et nous devons nous le réapproprier. Pour nous, il doit être le signe de la révolte contre le mensonge, contre un parlement qui s’est dévoyé, hier en Angleterre tout comme en France ce 23 avril 2013. Les tyrannies tombent à force de symboles. Symboles qui sont portés contre symboles qui fléchissent. Le nôtre sera celui d’un couple avec ses deux enfants. Celui qui tient le drapeau n’est pas moins ardent que celui qui manie le glaive. Il ne tue personne mais ceux qui doutaient avant de le voir se regonflent d’espoir, ils se sentent soutenus et peuvent alors croire en une possible victoire. Notre symbole est bizarrement devenu notre glaive. Puisse un grand nombre d’entre nous avoir la force de le porter.
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