Pauvres dégénérés qui ont pris Gustave Courbet au sérieux quand il voyait dans le sexe d’une femme, l’origine du monde. Comme s’il n’y avait rien avant l’enfantement. Le spectateur homme fasciné par son propre désir pouvait en oublier l’essentiel : sa responsabilité virile dans cette fécondation. Quant à la spectatrice femme complaisante, inutile de dire, qu’élevée à l’état de déesse, il lui était difficile de ne pas souscrire des deux mains à cette idée.
Ramener le monde, et par là même l’humanité à un sexe de femme, c’était donc oublier le rôle de l’homme dans cette fécondation, mais c’était aussi oublier que même les truies accouchent. Cette blague minable en peinture a pourtant réussi à s’imposer dans notre modernité comme le summum de la réflexion artistique. Tant et si bien que ce tableau fait aujourd’hui écho, plus que jamais, à notre société. Nous naissons d’un vagin, le monde naîtrait d’un vagin, ou de Gaïa si vous voulez. Or le monde ne naît pas d’un vagin. Le monde est né dans une étable il y a deux milles quinze années, ensemencé par un coup de rein divin. Nous allons bientôt fêter cet anniversaire à Noël.
A la fin, il y a eu la joie. Mais il a fallu d’abord le sang et les larmes. L’accouchement de Marie, c’est un peu l’épreuve avant l’heure, comme un signe avant-coureur de la croix. Joseph est le seul à être présent physiquement pour elle. Ce dernier est l’intercesseur de Dieu le Père sur terre, alors que Jésus est encore petit et fragile.
(Re)naître de l’impur.
La naissance de Jésus ne se fait pas dans la pureté. Elle se fait dans la merde d’une étable, en terre étrangère, dans le sang, après que Lui et sa famille eussent été jetés de toutes les maisons respectables. Les humains… souvent ils jettent ce qui ne les intéresse pas pour aller au plus court. Ils jettent les trisomiques pour se faciliter la vie, au moment même où ils passent à côté de l’amour de Dieu. Ils jettent la Sainte famille, certainement pour se prémunir de quelque impureté dans leur foyer. Ce sont les mêmes qui aujourd’hui vous parlent de Marie en des termes doucereux, pour éviter de mettre les mains dans la merde qui les entoure. Non, fermons nos portes, cultivons notre pureté et nos impuretés qui nous regardent en miroir, servons nous de la religion pour notre confort. Sombrons dans la contrition pour mieux nous donner raison. Il y a de l’idolâtrie dans le culte marial en ce moment. Pas une idolâtrie envers Marie comme le croient ceux-là, mais une idolâtrie envers leur propre personne. Ils se sanctifient dans la pureté et l’impureté. Ils vivent en confession close. Ils veulent de l’espoir, quitte à vivre dans le mensonge, quitte à mourir en fanatiques. Le diable leur ferait faire n’importe quoi à ces extrémistes. Ils n’attendent qu’un signe du ciel pour faire n’importe quoi, pour se libérer de toute incarnation. Ils sont des agneaux qui vivent au milieu des agneaux et qui n’ont que cette ambition là dans la vie. Ils sont également tenus par une espérance : que le monde soit sacrifié en sa fin dernière. Voilà leur ultime miséricorde. Suivre Jésus pour sauver le monde ? « Le diable est trop fort » vous répondront-ils immanquablement. Le diable est trop fort en eux surtout. Car il gouverne toutes leurs actions, à travers leur conception de la pureté.
Le texte évangélique qui parle de l’impureté de Marie et de Joseph.
Car Marie vit dans l’impureté jusqu’à sa rencontre avec Jésus le messie. Mais cela n’intéresse pas nos puristes qui veulent pouvoir s’idolâtrer et rester bien enfermés dans leur conception du non sens et de la fin des temps. Ce n’est même pas moi qui le dit et qui le ressent par tous les pores de la peau quand je pense à Jésus et à son sacrifice, mais l’Evangile qui laisse le plus de place à Marie, celui de Luc, au passage 2 22. Marie et Joseph sont allés se purifier au temple, comme tout bon juif de l’époque qui respecte encore l’Ancienne Alliance. C’est un anachronisme de penser que Jésus les avait délivrés de l’Ancienne alliance avant sa mort sur la croix et sa résurrection. D’ailleurs, comme toute démarche humble, c’est tout à leur honneur. Ils ne se sont pas vécus au-dessus de leur condition. Ils n’ont pas dit « Je suis pur, notre fils est le messie, pas besoin d’aller au temple ». Ils ont été se purifier car ils étaient impurs pour les Juifs qu’ils étaient. Et ils l’ont fait en respect de Dieu qui n’avait pas encore établi sa nouvelle alliance sur terre. On m’objectera certainement que pensant qu’ils étaient purs, ils sont tout de même allés se purifier pour éviter les médisances de la société. Je répondrai alors « péché d’incrédulité envers Dieu ». On me dira qu’ils n’avaient pas conscience de leur pureté. Je répondrais, « inconscients », ils étaient donc impurs… Qui fait l’ange fait la bête version n°1.
« Qui est ma famille ? »
Voilà la phrase de Jésus quand Marie et ses frères viennent le voir. Nous ferions bien de nous poser cette question quand nous voyons des catholiques s’enfermer sur leur conception familiale de la pureté pour bien éviter de se remettre en question, eux et leur dogme. Qui fait l’ange, fait la bête version n°2. Aujourd’hui, il n’y a pas plus bête que cette croyance mariale telle que ces fanatiques l’ont développée au sein de notre Eglise pour bien éviter toute remise en question. Qu’il y ait eu plus de morts en allant à Lourdes (accidents de voiture et autre…), que de personnes sauvées par la miséricorde céleste, cela ne les interroge pas. Non, ils veulent faire vivre leur croyance en dehors de la Vérité. Ils veulent aller loin pour se purifier. Ils ne veulent pas écouter leurs voisins mais ils veulent être suivis dans leurs sanctuaires. Ils ne veulent pas accepter de vivre dans l’erreur en sachant que leur Foi est impure. Ils veulent se maintenir dans leurs illusions, bien au chaud. Comme Saint Thomas, ils ont besoin de signes pour vivre. Le pardon de Jésus ne leur suffit pas, car ils ne veulent pas le creuser dans leur coeur. Triste attitude, surtout quand on reste dans celle-ci jusqu’à la fin de sa vie après avoir pourtant reçu des grâces à profusion. Que faisons-nous de nos talents ? La mère de Dieu apparaît au début de la vie de Jésus et un peu à la fin. Entre temps, Jésus vit. Faisons de même.
Que nous dit Jésus ?
« Je vous envoie comme des agneaux au milieu des loups », nous a dit Jésus. Il ne nous a pas dit de rester entre agneaux, de nous réconforter, ou de nous conforter en tant qu’agneaux. Ca, c’est une autre religion. Ce n’est pas l’Église. Jésus lui, nous a dit de nous aimer entre nous et d’aller à la rencontre du monde. Voilà le vrai chemin catholique. Le culte marial tel qu’il s’est construit aujourd’hui est souvent vécu comme un retour aux sources, au propre comme au figuré. Ces gens là, à l’image de nos nouvelles brebis perdues, veulent éternellement se ressourcer sur terre, accomplir leur « développement personnel » diraient d’autres qui n’appartiennent pas encore à la religion catholique. Il y a pourtant un temps pour vivre, un temps pour mourir, et un temps pour ressusciter. On ne peut impunément confondre ces temps sans faire le jeu de satan, par exemple en allant se ressourcer ailleurs qu’à la table du Christ.
Liens entre prédestination et culte marial.
Une autre caractéristique de cette croyance erronée, c’est la prédestination. Ils pensent tous que l’histoire des hommes est écrite, ils se gargarisent de prophéties « mariales » en ce sens, oubliant que Jésus les a fait libres de choisir entre le bien et le mal, et que tous les autres qu’ils ne connaissent pas, ont été investis de la même liberté. Ils semblent ignorer que rien n’est écrit en ce qui concerne leur âme et que rien n’est écrit chez le pécheur, que la miséricorde divine peut tout changer. Or nous marchons dans le brouillard avec la sainte Trinité pour toute lumière. Cet éclairage n’admet même pas selon les textes que des prophètes parlent au nom de Jésus. Si cela se faisait, ce prêcheur contredirait les écritures. Or parler au nom de Jésus en utilisant sa mère, ne me semble pas plus louable que la démarche qui est dénoncée par Jésus dans les Textes. Cette liberté de conscience dans la nuit est d’ailleurs le sens des textes eschatologiques. Le monde va vers son accomplissement, mais les humains ont le choix ou non de faire le bien et le mal. Cette liberté, ils la refusent car elle les met en insécurité. Ainsi peuvent-ils rester dans leur immaturité spirituelle et faire le jeu du malin. Car en organisant la faiblesse, ils laissent faire le mal.
Aller de Marie à Jésus ou de Jésus à Marie ?
Le Pape voudrait que Marie les ouvre à Jésus. Bien souvent j’ai l’impression que Jésus finit par leur servir de caution pour rester dans Marie. Preuve en est cette nouvelle congrégation que le Saint Siège a dû remettre au pas.
Durant des années, les Franciscains de l’immaculée ont poussé jusqu’au bout cette théologie erronée. On ne peut pas leur reprocher leur manque de sincérité. Puisque Marie était pure avant le sacrifice de Jésus, elle pouvait devenir co-rédemptrice du monde. Ainsi, ils ont pu devenir progressivement une secte qui s’est servie de la beauté de la liturgie ancienne en latin pour justifier leur enfermement marial. Evidemment l’Église a dû mettre urgemment le holà, avant qu’Elle ne soit complètement submergée par cette nouvelle attaque du démon. Seulement, il serait temps d’avoir le courage de faire ce travail de remise en question en profondeur, au sein même de l’Église. Nous avons joué avec le culte marial. Il est en train de nous brûler la chair de l’intérieur.
Le tout marial parmi certains croyants mine l’Eglise.
Ainsi, la situation est proprement ubuesque si on y songe. En donnant une place disproportionnée à Marie, notre Eglise vit d’un côté un enfermement dans une beauté immuable qu’elle est incapable de transmettre au monde (traditionalisme), de l’autre, elle devient perméable entièrement à d’autres croyances (progressisme), ces deux faces d’une même pièce étant la conséquence évidente d’une conception puritaine du monde, de Marie et des femmes en général. Nous voilà donc enfants déchirés entre notre Père et notre Mère sans possibilité de nous remettre en question, et de devenir plus forts, parce que nous nous sommes privés nous-mêmes d’avoir accès à cette remise en question à cause d’une conception puriste de notre religion, entièrement féminisée, sans altérité. Par exemple, de nombreux bus sont organisés en direction des sanctuaires mariaux sous la pression des « habituelles » tandis que nos paroisses se meurent et que les prêtres n’arrivent même plus à se faire entendre… ceci expliquant peut-être cela. Il y a des priorités qui mériteraient d’être revues à la hausse et d’autres à la baisse. Bien entendu, construire en paroisse, c’est difficile. Et il faut savoir de temps en temps prendre l’air ailleurs pour aller se « ressourcer » dans sa croyance. Cependant, nous devrions collectivement nous inquiéter de notre dépérissement dans le quotidien plutôt que de miser sur l’exceptionnel. Pour donner un exemple plus précis, les personnes en charge du chant dans les paroisses devraient être celles qui sont le plus aptes à le faire. Tout le reste n’est qu’orgueil. Si nous n’arrivons pas à magnifier la liturgie, pas la peine de faire le tour du monde pour évangéliser.
Signe des temps.
La crise actuelle de l’Église est un passage d’une conception catholique d’élites pacifiantes à une incarnation personnelle d’un sacrifice douloureux. Sur ce chemin de croix, il ne faut pas se leurrer, nous allons perdre du monde. Mais nous gagnerons des croyants prêts à faire des efforts. Ce sera un bien inestimable. Avant, toute la société, nous montrait la direction. Nous étions comme des enfants dans la Foi. Nous aimions cette situation confortable qui nous procurait la paix. Il n’y avait qu’à suivre notre maternel souverain spirituel adoubé par l’image du père temporel (le roi) et faire « comme si », dans le cas où on n’était pas d’accord. Désormais, adolescents, nous cherchons des limites à notre pratique. Bientôt adultes, espérons que nous saurons être catholiques au sein de ce monde, quoi qu’il arrive. C’est l’enjeu des changements de civilisation qui bouleversent notre société actuelle. Il nous faut vaincre et convaincre en état de minorité, faibles et alors que nous nous sommes nous-mêmes désarmés. Pour aller vers ce nouvel équilibre, nous ne pouvons nous contenter de dénoncer le mal sans plonger les mains dans les plaies sanglantes de Jésus et incarner la miséricorde de Dieu et Son espérance. Nous ne pouvons miser sur un troupeau d’enfermé(e)s dont on aurait pitié dans leur Foi.
En 40 ans, du débat sur les infanticides par avortement au débat sur les unions de duos, notre faiblesse a grandi.
Dois-je rappeler qu’uniquement 7 députés ont voté en novembre 2014 contre la réaffirmation d’un « droit à l’avortement » (1) alors qu’ils étaient 201 à s’opposer à l’avortement comme d’une « exception » en 1975… On voit tout le chemin parcouru en efficacité par notre Eglise. Lors du débat sur les unions de duos, les traditionalistes ont su dénoncer le mensonge. Ils n’ont pas su (con)vaincre le populo. Les progressistes quant à eux, se seraient bien contentés d’un énième mensonge pour tout signe de miséricorde envers nos contemporains. Certains d’entre eux ont su soulever les foules mais pour un résultat nul. Or si nous voulons vivre notre Foi et l’imposer dans ce qu’elle a d’éminemment supérieur pour cette société, la Vérité et la miséricorde doivent marcher main dans la main en nous. Voilà la réconciliation que nous devons opérer entre notre mère l’Église et le Père céleste, en rejetant traditionalisme et progressisme, non par l’intercession de Marie, mais par l’exemple du sacrifice de Jésus. Sinon, nous resterons ces enfants au sein de leur mère, inadaptés à la lutte, mangés par le malin, incapables d’accepter même un merci venant de l’extérieur. Nous serons un troupeau sacrifié sur l’autel du démon. Il nous faut devenir forts dans notre faiblesse et accepter la lutte, et non nous réfugier à chaque instant sous les jupes de Marie. A la fin, nous retrouverons Marie, certes, mais pas avant un long chemin de croix. C’est la seule et unique voix du guerrier catholique : l’esprit sacrificiel. Tel un bon père, le guerrier catholique aime Marie dont il sait qu’elle a enfanté le monde. Il sait aussi être homme et remettre les cultes à leur place par ordre de priorité. Le guerrier catholique sait donc faire preuve de mesure en toute chose, mais sait se battre de toutes ses forces pour la Vérité, en acceptant son identité de pécheur. Les excès de la lutte ne le portent jamais à des excès dans les idées. Tout l’inverse de ce que nous vivons aujourd’hui.
1 « L’Assemblée nationale réaffirme le droit à l’avortement », Le Monde du 26/11/2014.
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